Au pays de la terreur
les souvenirs ont gelé
et les mots face à l'horreur
impuissants se sont défilés
Le bruissement de la douceur
aux frissons glacés se confond
et la caresse du bonheur
à la froideur des tréfonds
L'amour qui chaudement enveloppait
le mouvement habité de la vie
dans la douleur brutalement s'est défait
emmêlé d'une colère infinie
Et la tristesse si tendrement humaine
qui lave le sang des âmes blessées
dans la violence ici souveraine
soudainement s'est pétrifiée
Et la menace qui au présent sidère
dans la mort qu'elle vient annoncer
brouille l'élan d'un désir qui se perd
dans le vide qu'il ne peut dessiner
Et le temps arrêté s'exaspère
dans un passé où l'avenir se noie
et le sourire du lendemain se terre
dans un ailleurs où le rêve se broie
Et la prière qui jaillit en plein cœur
de l'espoir sans cesses anéanti
ne sait à qui adresser sa ferveur
hommes et dieux ont déserté son lit
De la paix il n'est plus rien que l'ombre
dans le refuge de l'oubli
et du repos un sommeil qui sombre
dans les brumes que la peur a noirci
Le couperet meurtrier de l'absence
a banni la mémoire du soleil
qui appelle au matin la naissance
de ce regard qui s'émerveille
Ce regard soyeux qui se pose
sur un autre à nul autre pareil
ce regard qui fait fleurir la rose
promise à l'instant de l'éveil
Et quand l'esprit brisé s'enfonce
dans l'indicible de sa nuit
à la place de sa claire réponse
il n'est plus rien qu'un corps ébahi
Un corps qui se tend
qui se tord
un corps qui se rend
à la mort
Et que la vie en lui défend
comme l'arc tendu rappelle
qu'elle n'est jamais rendue au néant
qu'en lui aussi les mots sont éternels